- Eliott Alford
Marcher sur des œufs
Cela faisait désormais plusieurs semaines qu’Eliott était arrivé dans la région. Il devait bien l’avouer, il ne s’était absolument pas attendu à de biomes si différents situés si proches les uns des autres. Un désert, une île de glace, un volcan, des forêts… Il lui semblait que toutes les spécificités de sa région natale et des autres régions étaient réunies dans un même endroit. Et ce n’était pas un mal, bien au contraire. Tous ces paysages ne lui donnaient que l’envie de continuer à explorer ce nouveau monde et à le comprendre, lui, sa faune, et sa flore. Car, plus il avançait, plus il comprenait l’envie qui l’étreignait. Il avait quitté Johto pour devenir un dresseur mais, désormais, un but bien plus précis l’animait. Comment ne pas avoir envie, dans un endroit pareil, de défendre la richesse de cette magnifique biodiversité ? S’il devait s’entrainer, cela devait être dans ce but, et pas simplement pour prouver qu’il était le meilleur. De toute manière, Eliott ne l’était pas, et il n’en avait absolument pas la prétention. Il se remémorait aisément les derniers mots de sa mère, et comptait bien lui faire honneur. Sa famille avait toujours traité au mieux les pokémons qui les aidaient à subvenir à leur besoin, et, dans une région aussi fréquentée que celle où il se trouvait désormais, Eliott voulait garantir cet équilibre. Il était trop facile d’exploiter les pokémons ou de détruire l’équilibre naturel des choses.
Mais Eliott avait aussi la tête sur les épaules, et il n’avait de vision que théorique de la chose. Il n’était ni un dresseur puissant, ni un scientifique accompli. Aussi, comment vouloir aider à préserver le monde s’il n’y connaissait absolument rien ? Comment faire valoir ces pensées sans mettre les moyens et les efforts derrière pour pouvoir respecter sa promesse ? Visiter le pays en long et en large ne suffirait bientôt plus, et il devait désormais assumer un peu plus sa volonté. Le jeune homme s’était donc renseigné et, alors qu’il trainait du côté de la ville de Tervilna qui accueillait également la ligue, il était tombé sur un prospectus plutôt attrayant. Un ranger proposait un safari sauvage dans les zones environnantes afin de faire découvrir aux touristes et aux gens désireux d’en apprendre plus la faune à son état naturel. Un homme d’expérience, donc, qui devait par essence poursuivre le même but que lui. Il ne fallut pas longtemps au jeune dresseur pour puiser dans ses maigres économies et s’inscrire pour la « balade » qui devait durer deux jours, dont une nuit à la belle étoile au milieu des pokémons.
Lorsqu’il arriva le matin du départ, Eliott pu constater avec un mélange de dépit et de contentement qu’ils n’allaient pas être bien nombreux. Deux sentiments contraires facilement explicables : D’abord, le jeune homme était plutôt soulagé de ne pas se retrouver au milieu d’un groupe d’une quinzaine de touristes, car il pourrait sans doute plus en découvrir en petit comité. Le dépit, lui, venait d’une impression qu’il s’était déjà faite lors d’une de ses précédentes visites. Les dresseurs qui étaient là ne s’intéressaient ni à l’écologie, ni à son équilibre. Ils étaient des combattants hors pairs à qui seule la puissance importait. Que pourraient-ils bien faire avec de simples randonneurs qui voulaient admirer la nature ? Sous cette réflexion, Eliott soupira légèrement, mais il retrouva bien vite son sourire. Tant pis pour eux après tout. Leur groupe se constituait de trois personnes. Une jeune femme à lunette d’une trentaine d’année, le ranger qui les guiderait ces prochains jours, et un autre garçon, blond, d’à peu près son âge.
La petite excursion commença, et le groupe suivit avec un silence respectueux pendant que le ranger leur exposait le programme. La marche ne faisait pas peur à Eliott, après tout il avait l’habitude, et, visiblement, ses compères semblèrent sans soucis suivre le rythme durant les premières heures. Les lieux étaient vraiment magnifiques, et bien vite le jeune garçon se perdit dans la beauté sauvage de la forêt. Il avait vraiment bien fait de suivre ce parcours ignoré par les autres, et il était impatient d’en apprendre un peu plus.
- Octave-Auguste De l'Épée
Enfin, notre protagoniste rétorquerait probablement à une hiérarchie lui précisant qu'il n'est pas en vacance que pour vraiment comprendre un peuple, il faut connaître sur le bout des doigts les moindres recoins de la terre qui l’héberge depuis tant d’années, et tant d’autres choses. Heureusement qu’il doit se faire discret, ce qui le pousse au moins à garder le silence et par extension, limite son débit de conneries à la minute.
Mais bon, toutes les bonnes choses ont une faim.
- C’est un beau coin. Par contre je commence à avoir une furieuse envie de manger un morceau, pas vous ?
Pour une fois, Capitaine opine de sa tête féline : le Lixy commence aussi à avoir le ventre vide - c’est que la marche ça creuse, surtout avec de petites jambes !
O-A observe ses camarades en espérant que quelqu’un soit dans le même état que lui. D’ailleurs, il n’a pas semblé s’être spécialement attardé sur les autres membres du groupe jusqu’ici, absorbé dans sa petite bulle. Pourtant, il n’en est rien. Le dernier mâle des de l’Épée ne manque que rarement une information ou un détail de son environnement. La démarche assurée du Ranger connaissant les lieux par coeur, l’encre sur les doigts de la jeune maman chercheuse et l’air contemplatif du gars de son âge. Un jeune dresseur aussi.
- Eliott Alford
L’excursion se passait plutôt bien. Eliott en appréciait chaque instant, se sentant de plus en plus proche du métier de ranger qu’était en train de leur présenter le vétéran. La nature était belle, cruelle parfois mais faisait au moins preuve d’un élégant équilibre que les dresseurs saccageaient bien trop souvent. Et c’était sans doute exactement ça qui poussait le jeune dresseur à vouloir protéger cette faune et cette flore qu’il ne connaissait pourtant que depuis quelques jours. Ses autres camarades semblaient observer comme lui un silence respectueux quant à cette découverte. Le jeune homme ne regrettait donc absolument pas la décision qu’il avait prise plus tôt. La journée avait été particulièrement enrichissante, et Eliott en avait profité au mieux. La voix de l’un de ses partenaire du jour vint troubler ses pensées et le ramena sur terre. Le jeune homme blond avait raison. Ils avaient marché presque toute la journée en ne profitant que de quelques haltes, et la faim commençait également à se faire sentir pour le dresseur de Johto. Prenant un instant les devant, il hocha la tête avant de répondre.
« T’as pas tort ! Ça fait un moment qu’on marche et je pense qu’on a bien mérité de faire une petite pause. » Fit Eliott en souriant.
Le ranger opina également du chef, trouvant rapidement un endroit pour établir un campement de fortune. L’air était plutôt doux, et ils n’auraient à priori pas à craindre de pluie durant la nuit. Un sommeil sous les étoiles était donc tout indiqué, et, rapidement, tout fut mis en place. Un feu fût allumé et, lorsque tout fût prêt, Adrahm, le Wattouat d’Eliott, s’installa à ses côtés. Le jeune homme était agréablement surpris du comportement de son compagnon. S’il observait d’ordinaire une attitude plus agressive et vindicative, il semblait cette fois se tenir à carreau sans faire preuve d’une grande sociabilité. Au moins, il n’avait pas eu à déplorer de problème avec les différents pokémons rencontrés, ni avec les pokémons de ses compagnons de route. Afin de briser le silence qui s’installait, Eliott s’adressa au dresseur aux cheveux blonds.
« On a pas eu le temps de faire connaissance. Je suis Eliott ! » Dit-il, amical, tendant sa main vers son interlocuteur pour signer des présentations en bonne et due forme. « Alors, qu’est-ce qui t’a motivé à suivre cette excursion ? Un amoureux de la faune locale ? »
- Octave-Auguste De l'Épée
Un peu à l’ouest, Octave n’est pas d’une grande aide pour monter le camp - il a pourtant de solides connaissances dans le domaine de la survie. Mais puisqu’il doit jouer le touriste, il préfère éviter d’aider avec trop de professionnalisme le ranger, ce qui aurait amené des questions. La balade à beau être bien sympa, surtout au point de lui ôter son casque des oreilles pour la journée - il a ses limites. Une petite nuit avec un brin de rythme dans les oreilles va lui être nécessaire, sous peu, pour recharger les batteries.
Même s’il est bavard, Auguste n’a pas forcément prévu de beaucoup sociabiliser pendant le voyage. Installé au coin du feu, Orage roulé en boule à ses pieds, il s’apprête à mettre en place son casque et sa musique. L’autre touriste brise en premier le silence pour s’adresser à lui.
- Octave, Octave-Auguste en version longue.
Il répond à Eliott avec un sourire en retour, laissant tomber l’idée de s’isoler dans sa bulle pour l’instant.
- Je suis ici pour faire du tourisme et agrandir mon équipe. Comme je viens d’arriver, je m’imprègne un peu du coin. Mieux cerner la nature, c’est la base d’un pokédex bien rempli. Puis j’ai toujours aimé m’isoler un peu de la civilisation je crois, le charme d’une ville n’aura jamais celui d’un coin comme ça. T’es pas d’ici non plus je me trompe ?
- Eliott Alford
Eliott eu l’espace d’un instant un peu peur d’avoir dérangé l’autre jeune homme. Après tout, celui-ci s’apprêtait à s’isoler et tous n’étaient pas aussi enclins que lui à souhaiter sociabiliser. Ce n’était pas nécessairement un drame et le jeune homme n’aurait pas mal prit une réponse courte et froide de son interlocuteur, mais celui-ci sembla le suivre dans ce début de discussion sans rechigner. Et curieusement, l’inconnu, ou plutôt ledit Octave-Auguste semblait partager pas mal de points de vue avec l’originaire de Johto, même dans sa courte tirade. Ce fut donc avec le sourire qu’Eliott lui répondit.
« Enchanté… Octave ? Octave-Auguste ? O.-A. ? Qu’est-ce que tu préfères ? » Fit le jeune homme, légèrement amusé avant de poursuivre. « Non, je ne suis pas d’ici. Je viens de Johto à la base, d’une petite ferme perdue à côté du lac orage. Donc je dois t’avouer que je partage largement ton envie de calme et aussi celle de préférer la nature aux grandes villes. »
Le dresseur s’interrompit un instant alors que le ranger s’approchait. Il aida rapidement celui-ci à dégager une zone sécurisée pour allumer un feu de camp, puis, lorsque se fut fait, il reprit sa conversation.
« Et toi alors, tu viens d’où ? Je ne pense pas que tu sois de Nérova non plus, si ? Qu’est-ce qui t’as motivé à venir ici ? »
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