- Clara Finch
T’avais mis du temps à prendre ta décision, peut-être parce que tu venais tout juste d’arriver, peut-être aussi parce que t’étais triste de quitter la Davies, mais au fond, tu savais que c’était ce qu’il y avait de mieux pour toi. Pour ta propre santé. Parce que t’étais misérable, Clara. Les yeux cernés, ça faisait combien de jours t’avais pas dormis ? Combien de semaines que t’avais pas vu la lumière du jour ? T’es forcée de sortir, petite valise à la main, lorsque vient le temps de quitter le petit appartement beaucoup trop cher de Remnance que t’occupait pour te diriger vers Luminis. C’est là-bas que tu vas prendre l’avion. Tu t’efforces juste de partir assez tôt pour être en mesure de faire un détour.
Ton détour, tu le fais à Asteria. Tu t’étais inscrite au concours, dommage que t’ais pas eu le courage de t’y présenter. Le teint blême, le regard un peu perdu, t’avais les cheveux en bataille et ta tenue n’avait rien du style qu’on te connaissait pourtant si bien. Un jogging, un pull trop grand pour toi, tu étais presque effacée, ce qui était surprenant pour quelqu’un d’aussi pétillant que toi. Tu t’es arrêtée non loin du Dôme Enchanté. Il t’a suffit d’un regard pour connaître le gagnant. Paul. T’affichais un mince sourire en lisant ça. T’étais fière pour lui. Tu devrais sûrement le féliciter. Mais pas que. T’étais pas ici par hasard, tu savais que tu le trouverais ici. Heureusement, il serait sans aucun doute de bonne humeur suite à sa victoire.
Assise sur ta valise, les coudes sur les genoux et la tête dans les mains, tu l’attends. Et tu te redresses que lorsque tu le vois s’approcher, tentant d’étirer un sourire convaincant pour chasser la peur qui se reflète dans ton regard. T’as encore peur que le monde s’écroule tout autour de toi.
- Paul ! Félicitation.
Ton regard s’attardait tout autour de vous, ne s’arrêtant pas à un endroit en particulier, comme si t’avais peur que quelque chose vous tombe dessus. Un assassin, par exemple. Tu savais pas trop. Peu de choses faisaient du sens dans ton esprit. Voyages temporelles, menaces venues d’ailleurs, d’un autre temps… Tout ça, c’était trop. Beaucoup trop pour ton petit coeur. Tu te sentais plus en sécurité. Chaque ombre pouvait être une menace et toi, tu pouvais pas continuer ainsi.
- Paul T. Ergeist
À quelques pas me suffisent pour remarquer et reconnaître un visage connu. Le sourire sur mes lèvres s'élargit un peu plus alors que mes yeux se posent sur Clara. Je presse un tout petit peu le pas, pour m'approcher en la saluant. Tandis qu'elle se redresse à ma rencontre, je remarque la valise sur laquelle elle est assise. Prévoit-elle un long week-end loin de son appartement, pour avoir emmené autant d'affaires ?
Hey Clara ! Merci beaucoup ! Ça me fait plaisir de te voir ici. Ça va ?
Il me faut cependant quelques instants avant de tilter que j'ai déjà vu son visage aujourd'hui, tout comme j'ai entendu son nom. C'était il y a quelques heures à peine, au tout début du concours, lorsque furent annoncés les participants. Je me souviens seulement maintenant avoir déjà éprouver cette joie de la revoir. Probablement mes pensées étaient-elles jusque là brouillés par l'euphorie de la victoire.
Mais dis.. tu n'étais pas censée participer à ce concours, toi aussi ?
Le teint pâle, les traits tirés, les yeux cernés et le regard fuyant... Elle a l'air malade et l'inquiétude remplace bientôt la gaieté dans mon regard. Mon sourire s'estompe lentement tandis que mon visage affiche désormais un air concerné. Avec un peu d'appréhension, j'insiste sur la question déjà posée auparavant. Elle ne va quand même pas me tomber malade sur les bras ?
... Tout va bien ?
- Clara Finch
Tu réponds pas à sa première question, mettant sûrement trop de temps à réfléchir à la réponse appropriée. Pouvais-tu vraiment lui dire que tu ne dormais plus, que tout ça, ça te rendait malade ? Que t’étais trop jeune pour ce genre de connerie ? Que t’étouffais chez toi mais que t’étais trop anxieuse pour sortir de ton appartement ? Finalement, il enchaîne sur autre chose qui te fait baisser les yeux, un peu honteuse.
- Oui, j’aurais dû être là mais… C’est un peu compliqué.
Tu penses pas que t’aurais supporter de te tenir devant une foule en affichant un large sourire pour tenter de présenter le thème demandé. Alors c’était un peu compliqué, t’avais préférer fuir le regard des autres, ne te sentant pas de les assumer. Ta réponse ne semble pas lui plaire (ou alors c’est vraiment juste que t’as mauvaise mine) car tu le vois devenir plus soucieux en te regardant un peu plus attentivement. Tu soupirs, secouant doucement ta tête de droite à gauche avant de relever ton regard vers lui.
- Pas vraiment, si je suis honnête.
Tu gardes quand même ton sourire, c’est déjà une bonne chose.
- Je pars ce soir, je rentre à Galar.
T’étais arrivée à Nérova avec des rêves plein la tête et des étoiles dans les yeux, dans l’intention de te lancer dans une grande carrière tout en renouant avec ton frère. Finalement, ça ne s’était pas trop déroulé comme tu le pensais, lui étant rentré chez votre grand-mère et toi étant restée… Juste assez pour être témoin de toute l’horreur qu’avaient été les événements de Tervilna.
- Mais je tenais à venir te féliciter.
Lui dire au revoir, aussi. Puis, t’avais un service à lui demander, chose pour laquelle t’étais encore incertaine. Alors tu commençais par ça, tu verrais si t’avais le courage de lui demander par la suite.
- Paul T. Ergeist
Le soleil commence à baisser dans le ciel tandis que je tente de me persuader que Clara va en fait très bien ou qu'elle a juste un petit rhume. Il reste encore quelques heures avant que la luminosité ne décline réellement mais, dans le désert, l'air va rapidement commencer à devenir plus frais. Je passe une main dans mes cheveux pour les remettre rapidement en place avant d'enfouir mes pognes dans mes poches.
C'est pendant ma seconde d'inattention à m'occuper de la météo que la demoiselle se décide à lâcher soudainement la vérité de ce qui l'emmène ici. Sous la surprise, je perds le sourire amical que j'avais conservé durant l'échange, pour être remplacé par un air de stupéfaction sur mon visage. Parmi les nombreuses choses qu'elle aurait bien m'annoncer, celle-ci était probablement parmi celles que j'attendais le moindre. Et la voici pourtant, je le comprends seulement maintenant, en train de sous-entendre qu'elle est venue me faire ses adieux.
Oh, je... eh bien, d'accord. Il y a une raison précise à cela ? Tu es malade ?
Est-ce qu'il y a quoi que ce soit que je puisse faire pour toi ? Est-ce que tu veux que je t'accompagne jusqu'à l'aéroport ? Si ça peut te faciliter un peu les choses, pour pas que t'ais à porter ta valise, si tu veux...
Et dire que l'on n'a même pas eu le temps d'aller se prendre le café qu'on sentait proposé pour apprendre à un peu mieux se connaître, finalement. Elle me manquera, c'est certain, mais c'est surtout de savoir que nous aurions pu, avec un peu plus de temps, être de proches amis mais que cela ne sera pas le cas à cause de ce départ qui me peine. Elle est quelqu'un avec qui j'ai facilement pu tisser quelques liens, avec qui j'aurais aimé pouvoir en tisser quelques autres.
Elle me félicite de nouveau pour ma victoire, comme si c'était ce qui emportait cet après-midi. J'esquisse néanmoins un bref sourire amusé : malgré la situation et l'état dans lequel elle doit l'être, elle pense encore d'abord aux autres, à les mettre en avant et à les faire se sentir bien.
Il lui faudrait cependant penser un peu à elle-même : quelle que soit la raison exacte de ce départ si soudain, presque précipité, il s'agit forcément de quelque chose de grave qui l'affecte tout particulièrement. Un peu d'égoïsme pourrait alors être le bienvenu, pour qu'elle pense à faire le nécessaire pour aller mieux.
À quelle heure est ton vol ?
- Clara Finch
- Il est plus tard ce soir, j’ai pris un vol de nuit.
Peut-être que t’allais pouvoir dormir pour la première fois depuis les événements qui avaient marqué ton premier halloween à Nérova, une fois que tu serais loin d’ici. Tu savais pas si les menaces te suivraient ailleurs ou si le reste du monde allait être épargné de tout ce qui se passait ici, tu savais juste qu’il te serait plus facile de vivre dans le déni, de prétendre à une vie normale loin de tout ça. Tu lèves une main, la passe sur ton visage, essaies d’essuyer les larmes qui menace de rouler sur tes joues, tout ça parce que t’as pas envie de ça maintenant. T’as déjà assez pleuré, ces dernières semaines, alors que tu restais cachée dans ton appartement, incapable de supporter le monde extérieur.
- Je…
Les mots se bloquent dans ta gorge, manquent presque de t’étouffer alors que tu sens le tout peser sur tes épaules, sur ta poitrine aussi. C’est pas quelque chose dont t’as vraiment parlé, alors que tu t’isolais, loin de tout et de tous.
- Je vais pas très bien, depuis ce qu’il s’est passé à Tervilna.
C’était un euphémisme. T’allais terriblement mal. T’étais terrifiée et cette peur te paralysait, t’empêchais d’aller de l’avant. C’était pour ça que t’en étais venue à prendre la décision de partir. Peut-être que tu pourrais alors recommencer à vivre, même si tu ne partais pas le coeur léger, même si t’étais triste de devoir dire adieu à ceux qui avaient croisé ta route ici.
- Mais il y a quelque chose que tu peux faire pour moi.
Il te l’a offert, tu penses que c’est le bon moment. T’as pas besoin d’être accompagnée jusqu’à l’aéroport, tu te doutes qu’il a mieux à faire, comme fêter sa victoire, ce ruban dont il doit être fier. Puis tu sais que t’es pas de très bonne compagnie, ces derniers temps. T’as perdu cet éclat qui te caractérisait tant, cette énergie qu’on te reconnaissait si bien. T’es épuisée, tant mentalement que physiquement, ne trouvant pas repos la nuit, ni même le jour, te contentant de rester recroquevillée sur toi-même dans ton lit en fixant le vide. Tu portes une main à ta ceinture et décroche la première pokéball, celle que tu avais toi-même décoré sous le regard soucieux de celle qui l’occupait. Parce que son habitacle se devait d’être joli en plus d’être unique.
- Je lui ai promis de récupérer tous les rubans, ici, qu’elle serait la grande gagnante de la Couronne d’Arianne. Une promesse que je ne peux malheureusement pas tenir.
Parce que tu t’en vas. Tu avais confié tes autres pokémons à Isara, ayant une confiance aveugle en elle, mais Chanel… Tu lui avais promis de grandes choses. Puis, bien malgré toi, aussi passionnée avais-tu pu être, alors que ta route croisait bien souvent celle des spectres, ça réveillait désormais en toi des mauvais souvenirs. La panique montait en toi, plus qu’à l’habitude, te forçant donc de les garder plus souvent qu’autrement dans leur pokéball. C’était pas une vie pour eux. Pour elle.
- Mais toi, tu peux.
Tu tends une main pour attraper la sienne, la menant vers toi pour y déposer la pokéball. Tu sais qu’elle serait entre de bonnes mains. Elle aussi le sait. Après tout, t’es pas sans coeur au point de ne pas lui en avoir parlé à elle avant tout. C’est juste la meilleure chose à toi. Pour elle et pour ce que tu lui as promis. Mais pour toi, surtout, si tu veux pouvoir tenter de préserver ta santé mentale précaire. Les choses n’ont juste pas été faciles, n’ont pas été les mêmes, après ce qu’il s’était passé à Tervilna. Pourtant, tu faisais partie des chanceux, t’étais encore en vie. Mais à quel prix ?
- Paul T. Ergeist
Si ma mâchoire se serre quand elle termine sa phrase à propos de Tervilna, c'est bien sûr par triste à son égard, mais surtout de colère à l'encontre des responsable, qui ont physiquement et mentalement à ce point blessé des gens aussi innocents que Clara. Il a suffit d'une soirée pour faire disparaître l'étincelle dans ses yeux et le sourire sur ses lèvres. Et ça, c'est difficilement pardonnable. J'inspire pour tâcher de me calmer, ce n'est pas le moment de penser à ça et encore moins d'en parler, surtout pas devant elle.
Je déglutis alors qu'elle affirme que je peux l'aider à faire quelque chose. J'allais me pencher, prêt à attraper sa valise pour l'accompagner en croyant que c'est ce qu'elle était sur le point de me demander, mais elle continue sa phrase après une courte pause. Ce n'est qu'alors qu'elle approche sa pokéball customisée de moi que je commence à comprendre ce qu'elle veut me demander.
Oh, je... tu es sûre ?
Mais si Chanel a pour but de devenir une star des concours, alors je l'y aiderai. Ma victoire d'aujourd'hui me met en confiance quant à ce point. J'irai aussi loin que possible dans cette aventure de coordination, pour elle et avec elle. Mais aussi pour faire honneur au rêve de Clara, pour qu'elle soit fière de son pokémon et qu'elle ne regrette pas de m'avoir fait confiance.
Je ne suis pas vraiment sûr de ce que je devrais dire dans cette situation. Dois-je la remercier ? Ce serait étrange, ce n'est pas vraiment un cadeau qu'elle me fait, mais un service qu'elle me demande. Dois-je lui promettre que sa Mimiqui est entre de bonnes mains ? Ce ne serait pas vraiment nécessaire, si la dresseuse en doutait elle n'aurait pas fait ce choix. Je prends une nouvelle inspiration, le temps de trouver mes mots.
Je m'occuperai bien d'elle, Clara. Pour toi. Et je ferai en sorte que ce qui t'a mise dans cet été ne se reproduise plus. Grâce à mes pokémon, grâce à Chanel, je ferai de Nérova un endroit plus sûr, où chacun sera en sécurité. Même toi.
- Clara Finch
T’aimerais bien sourire, t’essaies même de le faire, même si c’est un peu forcé, un peu faux. Parce qu’il te promet qu’il allait prendre soin de Chanel et ça te fait plaisir. La suite, par contre, est un peu plus difficile à entendre, parce que ça te ramène inlassablement à cette soirée-là, celle où t’avais réalisé bien malgré toi que le rôle n’était pas tout rose et paillettes. Tu secoues alors doucement de la tête, comme pour lui dire que c’était pas ce que tu voulais, que c’était pas ce dont tu avais besoin d’entendre. Déjà parce que tu ne serais plus ici, préférant fuir les problèmes qui assaillaient la région, mais aussi parce que ça impliquait autre chose.
- Promets-moi juste que tu feras attention à toi, d’accord ?
C’est sincère, ça se voit dans ton regard, ça s’entend dans ta voix qui tremble un peu, qui menace de se briser sous l’inquiétude que tu ressens alors qu’il affirme qu’il allait se battre pour protéger les gens comme toi. T’aurais préféré qu’il te dise qu’il allait se contenter des concours, parce que, comme ça, t’aurais pas eu à t’inquiéter pour lui. Pas autant du moins.
- Tu as encore mon numéro, non ? Tu pourras me donner des nouvelles de Chanel.
Et de lui aussi, par le fait même. Après tout, s’il t’envoyait des messages, c’est qu’il était encore en vie et c’était ce qui t’importait. C’est ta façon un peu indirecte de lui demander de te donner des nouvelles, de calmer l’inquiétude que tu pouvais pas t’empêcher de ressentir pour tous ceux que tu connaissais et qui allaient rester ici. Tu pouvais pas t’empêcher de te sentir mal, de partir ainsi, aussi précipitamment, d’abandonner derrière toi des gens que t’aurais vraiment voulu apprendre à connaître davantage, mais c’était sûrement ce qu’il y avait de mieux à faire pour toi. Parce que t’en menais pas large et que, clairement, tu pouvais pas continuer comme ça.
- Spoiler:
- Clara confie Chanel, sa Mimiqui rang A, à Paul, en lui faisant promettre qu'il irait gagner la couronne d'Arianne avec elle tout en lui donnant des nouvelles quotidiennement.
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